J’accuse of Polanski : a film’s turbulent release in Paris

J’accuse, un scandale français

Le 13 novembre 2019, le film J’accuse de Roman Polanski est sorti, faisant grand bruit… C’est-à-dire, me demanderez-vous ? Que signifie « faire grand bruit » ? Et bien, cela veut dire qu’on en a beaucoup parlé. En bien, en mal ? Et bien.. disons que lors de sa sortie, les médias, avant de parler du film, ont plutôt parlé des événements qui ont eu lieu autour de cette sortie. Quels événements ? Voici le contexte.

"J’accuse of Polanski - Affiche"
"J’accuse of Polanski - Polanski and actor"
"J’accuse of Polanski - Actors"
Contexte de la sortie de J’accuse

Roman Polanski, réalisateur franco-polonais, a fui les USA où il résidait en 1977 alors qu’il devait être jugé une deuxième fois pour avoir abusé sexuellement d’une mineure. Il est toujours considéré par Interpol comme fugitif. Comme la France n’extrade pas ses ressortissants, Roman Polanski ne peut pas être arrêté par les autorités américaines sur notre territoire. Jusqu’aux années #MeToo, cela n’avait jamais vraiment posé de problèmes… d’autant plus que cette affaire américaine est très complexe : Polanski a purgé une première peine de prison, puis l’affaire a été reconsidérée et il risquait alors jusqu’à 50 ans de prison, c’est à ce moment-là qu’il s’est enfui à Paris, la victime lui a pardonné et a demandé à ce que tout ceci cesse mais les autorités américaines refusent…

Bref, les français ont donc eu tendance à penser que tout cela le rendait un peu victime du système judiciaire américain. Il a donc pu continuer à travailler, à créer, à être honoré et reconnu comme un grand réalisateur et metteur-en-scène par les professionnels du cinéma, du théâtre et des médias en général. Concernant les histoires d’abus sexuels qui le hantaient, qui se cachaient derrière son nom, il me semble que cela restait un peu anecdotique même si cela revenait régulièrement sur le tapis. Et puis, le mouvement #MeToo est arrivé et les françaises se sont mises à lui demander des comptes… et demander aux professionnels du cinéma, du théâtre, des arts et des médias en général de cesser de faire comme si il n’y avait pas d’accusation d’abus sexuels autour de Roman Polanski et bien d’autres. Ces femmes ont commencé à demander à ce qu’on entende la voix de celles qui auraient subi les violences de Polanski et à ce qu’on cesse de le porter aux nues pour son travail d’artiste puisqu’il se serait servi de cet art et de son aura pour abuser de jeunes-femmes… Ainsi, elles ont réussi, en 2017, à l’empêcher d’être président de la cérémonie des Césars (grand show télévisé où les professionnels du cinéma se décernent des récompenses) en lançant une pétition et disant : « Arrêtons de dire qu’’’il faut séparer l’homme de l’oeuvre” ou qu’”il a du talent”, car ce talent n’excuse rien ».

En 2019, Polanski sort J’accuse et une nouvelle femme l’accuse de viol , une française cette fois ; celui-ci aurait eu lieu en 1975. Pourquoi en parler maintenant ? Parce qu’elle ne supporte pas le fait que Polanski sorte un film sur la notion d’injustice…

"J’accuse of Polanski - #MeToo"
L’Histoire derrière ce film

J’accuse est un film sur un événement français tristement célèbre datant de la fin du XIXème siècle : un soldat français de confession juive est injustement accusé et condamné pour haute trahison par les autorités militaires. Après quelques années d’enquête, d’imbroglios et conflits politiques sur fond d’antisémitisme, et la célèbre lettre ouverte au président de la République d’Émile Zola, publiée dans le quotidien L’Aurore, intitulée J’accuse, le capitaine Dreyfus sera enfin réhabilité. Cet événement a inspiré beaucoup d’artistes, auteurs, réalisateurs, metteur en scène… Il semble que Polanski ait particulièrement bien traité ce sujet avec pour parti pris de montrer comment un homme, le Colonel Picquart, par simple honnêteté et goût pour la justice, va aller jusqu’au bout d’une enquête difficile à mener. Bravo à Polanski pour son talent, pour sa capacité à savoir raconter une histoire et nous faire entrer dans la complexité des relations humaines.

"J’accuse of Polanski - Capitaine Dreyfus"
"J’accuse of Polanski - feminicide"
Le talent est-il une excuse?

Mais même si son film est une réussite, Polanski, peut-il comprendre que son goût pour dénoncer l’injustice choque les femmes qui subissent depuis des siècles une injustice majeure : celle d’être traitées comme inférieures aux hommes, si bien que depuis que le monde du cinéma existe, des hommes se servent de leur position pour les traiter très souvent comme de simples objets ? Peut-il comprendre que l’impunité qui a été la règle tout au long du XXème siècle dans le monde des médias concernant les violences (sexuelles, psychologiques, morales…) faites aux femmes est la cause des boycotts de la sortie de son film dans les salles françaises en novembre 2019 et de tout ce scandale ?

Les autorités françaises de ce petit monde du cinéma commencent à comprendre puisque selon Le Monde du 14/11/2019 «  L’ARP, Société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs, réfléchit à d’éventuelles sanctions à l’encontre de ses membres mis en cause dans des affaires de violence sexuelle, une décision qui pourrait aussi concerner le réalisateur Polanski ». Ce n’est pas trop tôt ! Et oui, vous pouvez avoir tous les talents du monde, vous n’en restez pas moins un citoyen avec des droits et des devoirs…

Perfectionnez votre niveau de langue française:

Pour finir, je pense que J’accuse de Roman Polanski est un film à voir pour tout non français car il traite très bien d’un sujet historique particulièrement important dans la construction intellectuelle de l’identité française au siècle dernier. Je vous laisse donc découvrir sa bande-annonce et vous propose autour de celle-ci un exercice de discrimination auditive.

J’accuse d’Émile Zola

Enfin, retrouvez ci-dessous, dans son intégralité, la lettre d’Émile Zola publiée dans le quotidien L’Aurore en janvier 1898.